chapitre 10 : LA FORÊT ROYALE SOUS LA RESTAURATION, NOUVEAU CODE FORESTIER ET NOUVEAUX PROCÈS

Après l’épisode des Cent Jours, le vol de l’Aigle impérial se termine par le désastre de Waterloo et la forêt impériale de Grésigne retrouve son qualificatif de forêt royale avec l’arrivée de Louis XVIII, tandis que les communes des Pays grésignols alentour voient les nouveaux Maires, désignés par arrêté préfectoral, prendre leurs fonctions sous l’égide du nouveau pouvoir qui associe le « Trône et l’Autel « . Ces notables locaux, issus pour la plupart de la bourgeoisie foncière vivant autour de la Grésigne, enrichis par la vente des biens du clergé pendant la Révolution, furent aussi opportunistes que prompts à légitimer le retour de la Royauté qu’ils l’avaient été, quelques années plus tôt, pour accepter le sacre de Napoléon.

Comme l’indiquent les registres municipaux de l’époque, « leurs mains religieusement serrées », Maires et Conseillers municipaux prêtent alors le serment dont la teneur suit (1) « Je jure et promets à Dieu (écrit malicieusement « adieu » dans le registre de Puicelcy) de garder fidélité et reconnaissance au Roi, de n’avoir aucune intelligence, de n’assister à aucun conseil, de n’entretenir aucune ligne qui serait contraire à son autorité, et si dans le ressort de mes fonctions ou ailleurs, j’apprends qu’il se trame quelque chose, je le dirai au Roi ».

En matière de délation politique, le climat de suspicion et de dénonciation, entretenu par les Préfets de la Restauration à partir de 1816 dans nos pays grésignols, n’aura d’équivalent que celui du Second Empire. Bien que les Maires et Adjoints fassent, dès la prise de pouvoir par Napoléon III, « serment d’obéissance à la Constitution et de fidélité au Président », il faudra attendre les années 1853-1854 pour que certains des Conseils municipaux contestent auprès du Préfet « la participation financière de leur Commune au traitement d’un Commissaire de police politique, installé à Castelnau-de-Montmiral », prétextant « que les habitudes paisibles et les principes politiques de la population de leur commune ne sont pas susceptibles d’une surveillance particulière…»(2).

Un gendarme rural dans les années 1850

Si la population grésignole, encore très majoritairement illettrée, ne posait pas trop de problèmes comme opposition politique au régime de la monarchie restaurée, il n’en alla pas de même pour son comportement quotidien lorsque la crise alimentaire des années 1816-1817 se manifesta dans le pays,  provoquant  délinquances et violences sous de multiples aspects.

La Grésigne, en particulier, restera ainsi le lieu de toutes les tentations délictuelles sous forme de braconnages et de larcins de bois. La lutte pour la survie sera encore le lot des pauvres gens de nos villages grésignols lorsque disette et pénurie, après les épidémies de choléra et de rage autour de l’an 1835, recommenceront au cours des trois années 1847, 1848 et 1849. Protestant contre sa suppression, le Maire de Puicelcy justifiait alors indispensable la présence et le maintien dans sa commune d’une brigade de gendarmerie, par le fait que celle-ci sanctionna, au cours de ces trois années de misère, « plus de 60 délits forestiers »(3).

Une forêt entourée de misère et de précarité dans un environnement rural toujours isolé

Afin de soulager leurs administrés les plus pauvres privés de travail que l’on traitait, ici et là, de « fainéants » (déjà !), les autorités municipales des pays grésignols continuèrent à  organiser sous la Restauration des « ateliers de charité dans le but d’occuper les bras oisifs » de leur commune pour réparer ou créer les chemins vicinaux, étant en cela « les collaborateurs de sa Majesté qui fait de la classe indigente l’objet de sa sollicitude ».

Pour l’entretien et l’amélioration de la voirie existante, les Conseils municipaux soumis à la pression  et aux murmures des pauvres invitaient les propriétaires les plus aisés à payer leurs prestations en argent pour verser des salaires journaliers de misère servant à rémunérer les prestations vicinales en nature que les indigents effectuaient afin de pouvoir acheter le pain quotidien nécessaire à la survie de leur famille. A titre d’exemple, une délibération municipale de Puicelcy en date du 5 décembre 1816 réserve   « entre les familles les plus riches parmi les 231 familles de la commune, 1 536 journées de travail dont le salaire global s’élève à 1 152,11 francs, à raison d’un salaire journalier de 75 centimes ». Ce maigre salaire fut même réduit à « 60 centimes par jour »  sur décision prise par le Conseil municipal de Puicelcy le 20 octobre 1817. « Le prix du kilogramme de pain ayant été taxé à 33 centimes » par ordonnance du Maire de cette commune le 4 août 1815, une famille de 5 personnes ne pouvait donc s’offrir que 400 grammes de pain par personne au maximum pour survivre, le pain étant à cette époque l’aliment de base.

La pauvreté est alors si généralisée autour de la Grésigne que le 5 août de l’année suivante, dans le seul village de Puicelcy qui comptait alors 700 habitants, sur une population communale s’élevant à 2 250 habitants au total, il était décompté « 117 mendiants, dont 20 mendiants valides, 22 invalides et 75 enfants », lesquels, annonce froidement le Maire, « seront livrés à la charité publique et seront autorisés à continuer d’implorer la bienfaisance des âmes charitables étant donné l’impossibilité de la Commune à leur accorder des secours ».

A Penne, la proportion est la même puisque « les mauvaises récoltes de l’année 1817 acculent les pauvres gens encore une fois à la mendicité, et cette commune compte 25 mendiants invalides, 20 valides et 75 enfants qui vivent de charité »(4). Et cet état de disette alimentaire se prolongera jusqu’en 1823 suite aux gelées de 1820, aux tornades de grêle de 1821 et à la sècheresse de 1822.

Cette misère perdurera longtemps dans les pays grésignols. Les souvenirs oraux d’une personne âgée rapportaient en effet que, dans les années précédant la guerre de 1914, une dame de riche famille montmiralaise exigeait encore des enfants mendiant dans la rue un bout de pain, le récit de la prière du « notre père », dite à genoux sur le pas de sa porte, et qu’elle leur faisait même recommencer cette prière plusieurs fois en cas d’oubli ou d’erreur d’un seul mot ! La charité chrétienne des bourgeois de l’époque était un brin cruelle.

Dans la société rurale de ces temps faméliques et dans le contexte d’une misère importante où il s’agissait de contrôler la révolte qui grondait, les versements en argent des plus riches contribuables participaient au financement des prestations vicinales en nature effectuées par les plus pauvres, en complément des subsides du Département gérées alors par le Préfet et accordées en subventions aux Communes pour organiser des ateliers de charité. Ces ateliers aménageaient les premiers « chemins d’intérêt commun » reliant entre eux les villes et villages de notre région.

Les difficultés et les retards apportés au désenclavement routier des pays grésignols sous la Restauration (liaison Gaillac-Caussade)

Nos pays grésignols, pauvres et éloignés des centres urbains, accuseront un retard  économique et social par rapport aux autres pays voisins, aux sols plus fertiles, du Bas-Quercy montalbanais et de la vallée du Tarn. Le choix des tracés routiers opposa souvent les villages entre eux et les Conseils municipaux contestaient les agents voyers chargés de les mettre en place. Villages et hameaux situés à la périphérie immédiate de la Grésigne resteront longtemps mal desservis par un réseau routier qui ne s’améliora que très lentement, par tronçons successifs pour la construction desquels les difficultés furent nombreuses. Nous verrons même, à ce sujet, naître des différents entre Départements voisins.

Sans parler de la situation isolée des villages grésignols telle que celui de Penne, enclavé dans les gorges de l’Aveyron jusqu’à la construction de la ligne de chemin de fer Lexos-Montauban, ou celui de Vaour, esseulé entre la Grésigne et les causses d’Anglars marqués par l’étendue désertique du Frau, on mit aussi plus de 30 ans, de 1826 à 1858, pour se mettre d’accord  afin d’achever, à partir de Puicelcy, le tracé définitif de la liaison routière n°14 (actuel CD 964) entre Gaillac et Bruniquel. Cette route sera établie en définitive dans les gorges de la Vère après Larroque et non pas, comme le souhaitaient les Conseils municipaux de Puicelcy et de Larroque avec l’appui du Conseil général du Tarn-et-Garonne, dans la vallée du Gouyre à partir du carrefour de la Pierre du Lac, pour aboutir à Montauban par Monclar, s’opposant ainsi à la liaison de Gaillac à  Bruniquel.

Montoulieu en hiver

Ces différends entre les Départements limitrophes du Tarn et du Tarn-et Garonne bloqueront l’avancement des travaux routiers et on changea plusieurs fois de projet sur le tracé de cette voie routière essentielle au désenclavement  de la Grésigne dans sa partie  sud et sud-ouest. Comme en fait foi une délibération de la Commune de Puicelcy datée du 10 mai 1831, « les travaux pour le Grand Chemin du Pont de la Lèbre à Bruniquel n’ont pas été entrepris ». Cinq ans plus tard, le 16 mars 1836, le Conseil municipal décidait que « la Contribution extraordinaire de 16 118 francs, votée depuis  le 20 mai 1832, ne sera prélevée de 1837 à 1841 inclus que par quarts successifs et que si les travaux du Grand Chemin n° 14 du Pont de la Lèbre à la limite du Département de Tarn et Garonne suivent la même progression ». Cette condition, prudente et avisée, montre bien les difficultés qui  existent au niveau du Département du Tarn pour faire avancer les travaux routiers. Ce qui explique les précautions prises par la Commune de Puicelcy, comme celle de Larroque, intéressées mais prudentes pour verser leur part de financement à la construction d’une route très attendue. Cette route les désenclaverait en longeant la Vère vers la gare de Bruniquel où convergeraient les charrois transportant les bois débardés de la Grésigne.

De fait, ces travaux routiers n’étaient pas encore entrepris à la fin de l’année 1841 puisque,  dans sa délibération du 9 février 1842, le Conseil municipal de Puicelcy « supplie Monsieur le Préfet de ne pas différer la mise en adjudication des travaux de la Route Départementale n° 14 après Larroque jusqu’à Bruniquel…Route dont l’objet est la communication entre les pays de la Province du Quercy et du Languedoc…attendu que cette route est ouverte du Pont de la Lèbre jusqu’à Larroque, mais qu’il est dans l’intérêt de nos localités de parvenir à ce but pour les sortir de l’isolement et de l’oubli dans lesquels elles languissent depuis longtemps ».  

Ce n’est, il faut le souligner, qu’au cours des années 1854 à 1856 où sévit l’une des dernières crises alimentaires qui frappera nos régions grésignoles, et lorsque va s’achever la construction de la voie ferrée Lexos-Montauban, que les moyens nécessaires à l’établissement de la route pouvant la rejoindre, seront dégagés. Sera en effet déterminante « la contribution de 24 000 francs versée par les Communes de Puicelcy et de Larroque pour la construction du Chemin de Grande Communication n° 14  dit de Saint-Paul-Cap-de-Joux à Puicelcy pour se diriger vers Montauban, route qui une fois tracée depuis le Pont de la Lèbre à Larroque fut ouverte , mais resta  inachevée… pour rejoindre Bruniquel ». 

Cette contribution décidée d’un commun accord le 11 août 1850 sera conditionnelle car soumise au succès des négociations confiées par l’envoi de deux délégués pour chacune des Communes de Larroque et de Puicelcy auprès du Conseil général du Tarn, étant bien précisé que cette délégation intercommunale avait pour mission l’obtention de la poursuite des travaux routiers du chemin n°14, sinon le remboursement de cette contribution.

De fait, les délégués de Puicelcy et de Larroque eurent gain de cause puisque cette route sera ouverte et achevée en totalité, en taillant ici et là  dans les rochers des gorges de la basse vallée de la Vère, depuis Larroque jusqu’à la toute nouvelle gare de Bruniquel.

D’autre part, ainsi que le mentionnent ses délibérations, le Conseil municipal de Puicelcy (5) votait « un emprunt de 6 000 francs » lesquels, est-il précisé, ajoutés aux « 3 600 francs que le gouvernement a alloués dans sa sollicitude aux indigents » permettront de financer un atelier de charité pour « la construction d’une portion du chemin d’intérêt commun n° 48  de Grésigne à Monclar depuis Laval jusqu’au sommet de la Côte de Sire et vers la Pierre du Lac ». La réalisation de la route reliant Puicelcy à Monclar pour aller ensuite à Montauban sera ainsi menée de pair avec l’achèvement de la route Puicelcy-Bruniquel.

Ces nouvelles routes seront rendues praticables et aptes à la circulation de vrais charrois pour relier en particulier la  Grésigne aux gares voisines de Bruniquel ou de Penne, soit par Fonbonne et le Pas de la Lignée, soit par la vallée de la Vère. A partir de la seconde moitié du 19ème siècle, la voie ferrée s’imposera et l’on cessera alors de faire flotter le bois de Grésigne sur l’Aveyron, de même que s’arrêtera le transport du merrain au port de Gaillac. Le débardage des bois depuis leur lieu de coupe en Grésigne restait difficile et nécessitera la création d’une bonne voirie forestière pour  les porter aux routes menant aux gares de Bruniquel ou de Penne. Ce qui était la spécialité des charretiers des hameaux de Mespel et des Abriols, situés au nord-ouest de la forêt car les pays grésignols étaient les pays de nombreux muletiers. Ainsi la famille Soleil à Pont-Bourguet (lieu-dit entre Puycelsi et Larroque) avait 11 valets muletiers, nous rapporte Raymond Granier, qui empruntaient cette nouvelle route n°14 pour transporter le minerai de fer extrait sur le causse de la Janade à Puycelsi jusqu’aux deux haut-fourneaux des forges de Bruniquel, gros consommateurs de charbon de bois jusqu’à leur fermeture en 1879.

A l’est et au sud de la Grésigne, les gares plus éloignées de Cahuzac-sur-Vère ou de Gaillac, desservies par la ligne de chemin de fer Lexos-Toulouse mise en exploitation via Tessonnières en 1864 par la Compagnie d’Orléans, seront peu utilisées pour exporter  les bois de Grésigne.

Traversant la Grésigne du sud vers le nord, la route de Gaillac à Bruniquel (actuel CD n° 87), commencée par Maillebois en 1770, nécessita des travaux s’échelonnant sur plusieurs décennies jusqu’en 1826 pour achever le tronçon entre le Pont de la Lèbre et le Pas de la Lignée, puis le tronçon jusqu’à  Bruniquel. Cette route ne fut donc utile qu’une trentaine d’années pour rendre les bois de Grésigne flottables sur l’Aveyron, avant d’être utilisée pour desservir la gare de Bruniquel à partir de 1858. 

Pour résumer l’histoire du désenclavement de la forêt de Grésigne, que Froidour jugeait indispensable et que Maillebois ne put résoudre, les bois de Grésigne furent exportés par voie fluviale à partir du port de Gaillac qui n’a  pu être desservi de façon correcte qu’après la fin du Premier Empire à partir de Castelnau de Montmiral. La  liaison de Puicelcy à Montmiral se faisant alors sur la rive gauche de la Vére à partir de La Capelle, où l’on  pouvait emprunter aussi le chemin de Bozat pour se rendre à Gaillac. Puis, sous la Restauration, débute une période de transition où le flottage des bois sur l’Aveyron complète le transport fluvial sur le Tarn, tandis que sous le contrôle préfectoral,  Départements et Communes se lanceront dans une collaboration financière difficile pour établir des projets routiers dont la réalisation ne sera que  très partielle. Ce n’est qu’après 1850-1860, au cours du Second Empire, que la forêt de Grésigne et ses communes limitrophes seront désenclavées grâce à un maillage de routes nouvelles permettant la vidange des bois par les deux voies ferrées : celle de Lexos-Montauban dans la vallée de l’Aveyron et celle de Lexos-Toulouse dans la vallée du Cérou. La partie nord-est de la forêt pourra même être dès lors desservie et facilitée par l’aménagement de chemins forestiers permettant le débardage des bois par le Pas de Haute-Serre à partir de Vaour, vers les gares de Vindrac ou de Saint-Antonin. Mais c’est principalement pour la partie ouest de la forêt par le Pas du Sauze ou bien par le Pas de Mespel à partir de Puycelsi et pour la partie nord, par le Pas de la Lignée, que les bois de Grésigne seront livrés aux gares de Penne ou de Bruniquel. Complémentairement, les bois de la partie sud de la forêt seront acheminés, à partir de la Grande Baraque, par Castelnau-de-Montmiral jusqu’à la gare de Gaillac.

Signalons que le projet de deux chemins de fer à voie étroite, établis en vain au cours des années 1900-1905, l’une pour relier Bruniquel à Cahuzac-sur-Vère par la vallée de la Vère (dont l’échec rappelle celui du canal avorté entre 1748 et 1772) et l’autre, depuis  la gare de Vindrac à Carmaux, auraient pu jouer un rôle important pour le désenclavement de la Grésigne à cette époque.

Autres handicaps des pays grésignols

A l’isolement des pays grésignols s’ajoute un environnement de relative pauvreté qui se prolonge au 19ème siècle au cours duquel persistent d’autres handicaps qui ont aggravé les conditions d’une vie précaire pour la plupart de leurs habitants. Au-delà d’un exode rural important, cette précarité explique leur attachement à des droits d’usage dans une forêt leur fournissant diverses ressources constituant un apport complémentaire vital pour la vie quotidienne, mais aussi pour l’activité agricole ou artisanale.

Conséquence d’une vie rurale autarcique, les maigres budgets annuels votés par les Conseils municipaux privèrent longtemps d’école les petites communes rurales autour de la Grésigne. Seuls les enfants des familles les plus privilégiées pouvant payer le régent, bénéficiaient d’une scolarisation. La loi Guizot du 28 juin 1833 provoqua la réticence des Maires pour prendre en charge la construction d’une école communale et plus encore, pour voter une imposition spéciale supplémentaire destinée à assurer la gratuité d’une scolarité de quelques enfants pauvres. Les classes sociales privilégiées de la Restauration, représentées par les gros propriétaires fonciers, considéraient même que l’instruction donnée aux pauvres en milieu rural était néfaste voire dangereuse et susceptible de répandre les idées révolutionnaires. Ce qui conduisait Eugénie de Guérin à écrire depuis son manoir d’Andillac non loin des taillis et des futaies de notre Grésigne « qu’il valait mieux un chapelet qu’un livre dans la poche du laboureur ». Quant aux Conseils municipaux de nos villages représentant un pouvoir oligarchique, ils estimaient, à l’instar de celui de Puicelcy « que les sacrifices que s’était imposée leur Commune pour faciliter l’instruction de huit élèves des classes indigentes étaient inutiles et sans résultat, car ils ne suivaient l’école que le moment pendant lequel leurs parents ne pouvaient les occuper ailleurs ».  Prétexte hypocrite pour supprimer, le 10 mai 1833, l’imposition spéciale en faveur des instituteurs de ladite Commune pour  qu’ils assurent la scolarisation gratuite de quelques enfants choisis parmi ceux des familles pauvres. Selon les statistiques  présentées par Charles Portal dans l’annuaire administratif et économique du Tarn, « le  nombre de jeunes gens illettrés pour le Canton de Castelnau-de-Montmiral était  en moyenne de 76%  pour la période 1827-1837 … et de 59% pour la période 1847-1857 ».

Le travail des enfants était généralisé et s’opposait à leur alphabétisation. Dès le plus jeune âge, les enfants, dont le taux de mortalité  pouvait atteindre 50 % avant l’âge de 10 ans, participaient alors à de multiples occupations, en particulier au ramassage du bois mort en forêt et à la confection des fagots. Ces fagots servaient, outre aux besoins domestiques, aux chaufourniers pour la fabrication de la chaux avec des pierres calcaires dans des fours rustiques creusés à même le sol, aux boulangers pour la cuisson du pain, ainsi qu’aux nombreux tuiliers et briquetiers utilisant les argiles rouges déposées sur les versants de la Grésigne dominant la vallée de la Vère.    

Pour terminer le tableau de cette misère rurale grésignole sous la Restauration, notons aussi les épidémies, celle du choléra en 1835 par exemple, et ces dysenteries estivales qui, aggravant les effets de la sous-alimentation et des mauvaises conditions d’hygiène, rendaient la vie encore plus précaire pour les plus pauvres qui subissaient de temps à autre également des épidémies de rage. Handicapés par l’isolement et la relative infertilité de leurs terres, la plupart des habitants des alentours de la forêt de Grésigne ont eu longtemps une vie dure et difficile.

De nombreux historiens de la ruralité en France ont vérifié l’hypothèse selon laquelle il y a une évidente corrélation entre la croissance de la population et l’augmentation des ressources alimentaires. Ainsi, pour les pays grésignols, la croissance démographique est liée aux époques de paix succédant aux périodes de guerres et de troubles engendrant disettes et épidémies. A la Guerre de Cent Ans qui avait ruiné notre région, succéda la prospérité du pastel depuis la fin du 15ème jusqu’au début du 16ème siècle qui nous conduisent à la première Réformation de la Grésigne en 1542 sous François Premier. Après un demi-siècle de guerres de religion, viendra ensuite le règne de Louis XIV à la fin duquel la misère populaire sera aggravée par le petit âge glaciaire de 1690 à 1709 suivi par une série d’épidémies de peste, causes d’une baisse importante de la population locale qui ne retrouvera son niveau normal qu’à la veille de la Révolution. Cette reprise de la démographie sera accompagnée par un défrichement intensif de terres de causses dégrevées de la taille par Louis XV, avant d’arriver à son apogée démographique qu’elle retrouvera au milieu du 19ème siècle.

Ainsi que le prouve, par exemple, le « Registre des Défrichements de la Communauté de Puicelcy entre 1760 et 1788 », la mise en culture des maigres parcelles sur les causses avoisinant la Grésigne donnèrent lieu à l’entretien de ces champs enclos de murets de pierre côtoyant des « cayrous », tas de cailloux amoncelés provenant de l’épierrement d’un sol ingrat. Mais ces parcelles seront abandonnées au fur et à mesure que se produira l’exode agricole dès les années 1850.

Les surfaces estimées de la forêt de Grésigne par des méthodes d’arpentage approximatives

La  première superficie indiquée pour la Grésigne remonte, avant la visitation de Froidour en 1666, à « 7 150 arpents de bois à la mesure ordinaire de Toulouse qui est de 576 perches composées de 14 pans carrés »,  surface de nouveau rectifiée et portée à « 7 882 arpents 75 perches » par l’arpentage effectué après la grande Réformation en 1676. Qu’est-ce à dire ? Si l’on prend pour base « un pan (ou empan)» de 0,228 mètre en vigueur dans la région toulousaine, chaque « perche de 14 pans carrés » correspond à 10, 089 mètre carré par excès,  ce qui porterait  « l’arpent de 576 perches » à 58 ares 11 centiares.  Il en résulterait une surface de la Grésigne  égale à 4 155 hectares en 1658 et à 4 580 hectares en 1676.

Selon le rapport des Eaux-et-Forêts de 1754 repris par une note de Charles Portal, un arpentage approximatif avait permis d’estimer la surface de la Grésigne à partir d’un rectangle où elle s’inscrivait tout entière, « rectangle mesurant 4 486 toises de longueur sur  3 228 toises de largeur égal à une superficie de 14 480 808 toises carrées, soit une superficie de 10 765 arpents sur la base de 1 344 toises carrées pour faire un arpent, mais comme il a été fait des emprunts pour faire le rectangle, il fallait réduire sa surface de 432 arpents pour obtenir une surface de la forêt égale à 10 233 arpents ». La toise correspondant à  1,949 mètre, il en découle que l’arpent (ci-avant défini par 1 344 toises carrées) vaudrait 51,0532 ares, et que les 10 233 arpents représenteraient donc une surface forestière approchée de 5 224 hectares. Peut-être s’agit-il là d’une superficie fantaisiste mais habilement surestimée pour augmenter la location annuelle de la Grésigne que le Roi avait fixée pour Maillebois  « à perpétuité à deux mille cent setiers de bled sur le pied de 18 livres le setier pendant 40 années  » ?

Autre question : malgré la construction du mur que Froidour avait fait réaliser en 1666 pour la protéger du grignotage progressif opéré par déboisements sur ses bordures, la forêt de Grésigne aurait-elle subi, lors de son inféodation à partir de 1770, des défrichements importants par la colonie de vosgiens déjà citée, installée dans les abords de la forêt pendant les 10 à 15 années que dura le contrat d’inféodation consenti par Louis XV au Comte de Maillebois ? Nous avons vu que ce dernier, lorsque son inféodation fut supprimée en 1779, obtint cependant, par décret du 28 février  1782 pour acquitter ses dettes, l’autorisation de « couper toute la Grésigne sauf à y laisser 750 arpents de haute futaie », entre autres défrichements, concession que le Conseil municipal de Puicelcy approuvait pour augmenter les terres cultivables de  la commune mais que Maillebois, définitivement ruiné, n’aurait pu accomplir avant 1785 quand la forêt fut de nouveau placée sous l’autorité de la Maitrise de Villemur. Quoiqu’il en soit, une autre mention de la surface de la forêt, adoptant le système métrique pour la première fois, est celle de 4 080 hectares que nous avons déjà signalée dans un document fiscal d’imposition de la Grésigne pour l’an 9 (1801-1802) qui se rapproche des 4 155 hectares ci-avant mentionnés pour l’estimation de 1658.

Les Archives départementales du Tarn ont conservé le « procès-verbal de reconnaissance » établi le 25 janvier 1818 par un nouveau « Garde Général » prenant ses fonctions en Grésigne à la tête de cinq gardes forestiers nommément désignés. Ce procès-verbal nous présente un état descriptif sommaire de la forêt de la Grésigne, telle que la voient des hommes chargés de la parcourir de long en large pour la protéger des abus de toutes sortes, en marteler les arbres destinés à l’abattage, en contrôler les coupes…Bref ! Veiller à son bon entretien au début de la Restauration. Il nous indique aussi un ordre de grandeur arrondi à la centaine près pour situer  la superficie de la Grésigne à « 9 000 arpents d’ordonnance, soit 4 500 hectares », selon une appréciation fondée sûrement sur la correction des rumeurs d’arpentages anciens portant la surface de la Grésigne à 10 033 arpents en 1747. Cette indication de la surface de la forêt de Grésigne en 1818  est faite en « arpent d’ordonnance », celui dénommé par Charles Portal « arpent forestier », équivalant à 51 ares 12 centiares (8), éliminant ainsi un autre type d’arpent plus petit dit « arpent de Paris » ne valant que 34,188 ares qui réduirait  la surface de la forêt à 3 076,92 hectares.

Que signifient au demeurant toutes ces catégories d’arpents différents pour connaître l’évolution de la superficie de la Grésigne de 1658 à 1818 ? Les variations du nombre des arpents mesurés à diverses dates sont le résultat de méthodes d’arpentage fort approximatives effectuées avec peu de soin.  En fait,  baser nos calculs sur des variations liées à la dimension des arpents utilisés, arpents à géométrie variable selon qu’il s’agit d’arpents toulousains ou d’arpents parisiens, d’arpents forestiers, d’arpents d’ordonnance (ou autres encore !) aboutit à des résultats fort différents, compris entre 4 080 et 5 224 hectares.

Ces mesures seront plus précises cinq ans après le nouveau « plan d’aménagement de la Grésigne » résultant de l’Ordonnance du Roi Louis XVIII en date du 17 décembre 1823,  en indiquant une surface fiable de 3 354 ha 56 a 89 ca. Cette dernière superficie mesurée en hectares est une référence sûre et elle se rapproche de celle de la forêt contemporaine qui était affichée à 3 389 hectares en 1970, puis à 3 527 hectares en I983 après les derniers achats consécutifs effectués par les Domaines à la famille de Tholosany dans les communes de Puycelsi (aux lieux-dits « la Vène » et « les Grèzes ») et de Larroque (au lieu-dit « les Gasques »).

Au cours de cette période de 165 ans (entre 1658 et 1823),  la haute futaie de la forêt de Grésigne a donné lieu à des coupes atteignant près de 25% de sa surface totale, ce qui correspond par ailleurs dans des proportions semblables aux déboisements importants constatés pour les bois communaux de Penne qui passèrent de 200 hectares en 1668 à 145 hectares en 1824. Ces déboisements ont été observés également pour les bois communaux de Vaour qui passèrent au cours de la même période de 250 à 212 hectares (9) ou bien encore, à la diminution constatée des bois domaniaux dans le département du Tarn, passant de 12 772 hectares en 1802 à 8 205 hectares en 1832 (10).

N’est-il pas non moins étonnant que divers auteurs affirment que les surfaces boisées de la forêt de Grésigne à l’époque gallo-romaine s’étendaient plus ou moins jusqu’aux portes de Cestayrols (11) où l’on a découvert la présence de constructions appartenant à une villa dont les habitants utilisaient les essences arbustives présentes actuellement en Grésigne, et dont ils mangeaient aussi cerfs et sangliers. Ainsi, la surface de la Grésigne, compte tenu des étendues boisées attenantes qui ont pu y être englobées, a pu avoir aussi des limites plus ou moins fluctuantes. L’étendue géographique boisée du massif grésignol et la propriété juridique de la forêt de Grésigne, n’ont pas toujours été forcément identifiées et distinguées très clairement pendant les époques anciennes du Moyen Age où les notions de titres de propriété ou d’usage pouvaient prêter à confusion.  

Les difficultés de la gestion forestière en forêt de Grésigne au début du 19ème siècle (procès-verbal de reconnaissance de 1818)

En 1818, « le procès-verbal de reconnaissance », rédigé par un responsable forestier venant de prendre ses fonctions à la Grande Baraque,  mentionne une forêt bien entretenue, bien surveillée, « où l’on n’aperçoit plus aucun délit ni abus répréhensible ». Cependant, en matière d’exploitation, le diagnostic reste le même qu’au temps de Froidour ! On n’y vend encore que « 4 parcelles de 9 hectares », soit « 36 hectares de coupes à 160 ou 180 francs l’hectare ». Ce qui ne représente que de faibles ressources plafonnant autour de 70 000 francs par an pour toute la Grésigne. Et le nouveau Garde général nous en fournit l’explication en ajoutant les remarques suivantes : « Même si la Marine et l’Artillerie ont le droit de s’y pourvoir, étant donné les difficultés pour rendre le bois flottable (à partir de Bruniquel via l’Aveyron, ou bien de Gaillac via le Tarn), les entrepreneurs, pour parer à cette perte, ne donnent jamais la juste valeur des coupes et le Gouvernement doit en diminuer le prix de vente ».

Aussi, vu la difficulté de débarder des grumes de longues dimensions par des chemins « vieux comme le déluge » et quasi-impraticables pour les charrettes qui s’y embourbent souvent jusqu’au moyeu des roues, ce même rapport précise qu’en 1818 « tous les bois des coupes se débitent en merrain et les rebuts se charbonnent….», attendu par ailleurs « qu’il existe trois usines ou verreries entourant la forêt, dont deux appartenant à de Suère ont cessé leur travail depuis deux ans, et que la troisième est une superbe usine en fer appartenant à la famille de Robert qui continue à s’approvisionner en forêt ». Il en résulte une gestion forestière peu dynamique, desservant en grande partie les besoins locaux en merrain et charbon de bois. 

Pour compenser l’insuffisance des revenus de la forêt de Grésigne, le Garde général nouvellement installé à la Grande Baraque en 1818 n’hésite pas à préconiser à ses chefs hiérarchiques « d’indemniser rapidement le Comte d’Huteau, Baron de Montmiral, pour s’affranchir des droits de dépaissance qu’il prétend avoir en forêt », afin que « la Grésigne puisse donner un revenu supplémentaire annuel de 10 à 12 000 francs en permettant la dépaissance de 2 000 bêtes à cornes au tarif de 6 francs l’une ». Et ce, sans aucun souci des dégâts que pourrait entraîner une telle proposition. Mais elle témoigne de l’importance du cheptel vif bovin et les besoins de l’élevage de ces animaux de trait dans l’économie rurale des pays grésignols, soumis fréquemment aux cycles de la sècheresse estivale et qui ne connaît pas encore les bienfaits de la luzerne. Ainsi, le nouveau « Garde général de la Grande Baraque », dans son « procès-verbal de reconnaissance », souligne l’aide que pourrait apporter  encore en 1818 une forêt-pâturage très utile à un territoire agricole périphérique peu fertile, cultivé par une population nombreuse et difficile à nourrir où, selon son rapport, l’on compte dans les communes limitrophes « Montmiral avec 450 feux, Penne avec 340 feux, Puicelcy avec 360 feux, Vaour avec 110 feux, Saint-Beauzile avec 110 feux, Le Cayrou avec 88 feux  » (soit 6 500 à 7 000 habitants au total si l’on compte 4 à 5 personnes par feu). Mais nous  précise-t-il   « toute cette population est sans industrie si ce n’est le village de Penne où on fabrique des cordages et les autres sont tous agricoles ».

A la fin du Premier Empire, la forêt grésignole semble donc avoir été remise en état car bien surveillée et mieux entretenue, débarrassée des manants mais aussi des petits paysans et artisans à qui on avait retiré tous privilèges. C’est cependant une forêt toujours enclavée où la vente de 36 hectares de coupes par an en vue de la production de merrain et de charbon de bois est de faible rapport et où les puissants du jour tiennent encore droit de dépaissance et droit de chasse.

En 1818, la Grésigne, sur le pourtour de laquelle viennent de se fermer deux verreries sur les trois qui fonctionnaient encore deux ans auparavant dont celle du Sauze et de Littré à Puicelcy, vit au rythme du travail des merrandiers (12) et des charbonniers, sous le contrôle des cinq gardes forestiers qui limitent désormais aux populations locales riveraines l’exercice de leurs droits d’usage au seul ramassage du bois-mort. Une tolérance qui allait être de nouveau remise en question dix ans plus tard par le Code Forestier de 1827.

Maison forestière
Le 19ème siècle, âge d’or de la vènerie en Grésigne

En 1818, le nouveau Garde général s’exprime avec moins de zèle pour tirer parti des ressources cynégétiques de la forêt, en notant  seulement dans son procès-verbal  « on ne voit plus en Grésigne ni loups, ni renards. La chasse est donnée à Monsieur d’Ouvrier, seigneur de Bruniquel, capitaine de louvèterie, qui vient mettre régulièrement aux abois le sanglier dont sa formidable meute a trouvé la quête ». Curieusement, il ne vient pas à l’idée de cet agent forestier que la chasse pourrait apporter des revenus supplémentaires à la gestion de la forêt.

La forêt de Grésigne, renommée pour ses chevreuils, donnait lieu sous l’Ancien Régime à une chasse à courre réservée aux grands équipages de hauts personnages tels ceux du Duc D’Arpajon que cite Trémoliéres dans son livre sur «  L’Art de la chasse  » publié en 1724. Ce sera ensuite, de 1800 à 1912, l’âge d’or de la vènerie en Grésigne avec les équipages « d’Hypolite de Solages qui chasseront le loup en Grésigne en 1800 avec 20 gascons saintongeois », suivis par les équipages non moins prestigieux de ses successeurs de Malartic, de Puysségur et autres qui loueront la forêt de 1835 à 1890 par l’intermédiaire de « la Société de chasse  de la  Grésigne », à laquelle succèdera « le Rallye de Grésigne » présidé par Charlet de Rieu habitant à Fonbonne et dont le chenil était à Hauteserre jusqu’en 1912 où l’on commencera à tirer les sangliers. Arrêtée en Grésigne depuis la Guerre 1914-1918, c’est en 1979, bien après la Seconde Guerre, que le « Rally Malamort » deviendra adjudicataire de la  chasse à courre en Grésigne permettant à divers équipages de forcer cerfs et chevreuils dont la taille et le poids seront améliorés par croisement avec ceux de la forêt de Fontainebleau. Le laisser-courre du lièvre ou du renard y sera également pratiqué par divers équipages spécialisés avec des chiens Bleu de Gascogne.

Cerfs et chevreuils se sont largement disséminés hors de Grésigne et sont aujourd’hui chassés à tir, en fonction du nombre de bracelets annuels vendus aux sociétés de chasse alentour de la forêt. A titre d’exemple, la société de chasse de Penne bénéficiait, au cours de saisons annuelles récentes, de bracelets correspondant à 40 têtes de cerfs à 80 € l’une et 60 à 70 bracelets de chevreuils à 19 € chacun.

En ce qui concerne les sangliers, les périodes de quasi-disparition ont alterné de tous temps avec des périodes de prolifération au cours desquelles la forêt de Grésigne sert de refuge à ces « bêtes noires » considérées alors comme nuisibles. Dans son livre « Totes à l’espera (Tous à l’affût) », Daniel Loddo indique par exemple qu’en 1702 : « le Seigneur-Evèque du Diocèse d’Albi écrit à l’Intendant Royal de Montpellier, Monseigneur de Lamoignon de Baville, pour lui demander de permettre à tous les habitants  de Lisle, Gaillac, Montmiral et autres lieux circonvoisins de la forêt royale de la Grésigne…/… se plaignant des dégâts considérables aux fruits de leurs terres, à ne pouvoir faire de récoltes pour payer les tailles et charges de leurs biens… /… de pouvoir tirer pendant toute l’année  les sangliers sur leurs terres hors de ladite forêt ».

Plus récemment, au cours des années 1980-1990,il sera procédé à des lâchers de sangliers provenant de croisements avec des porcs d’élevage. Les hybrides ainsi obtenus avec des cuisses plus arrondies, un dos plus large et un groin moins prononcé que les vrais sangliers de jadis, se reproduisent à profusion en Grésigne et dans les communes périphériques devenant aujourd’hui de vrais nuisibles exigeant des ouvertures de chasse de plus en plus précoces.

Le nouvel aménagement de la forêt de Grésigne en 1823 : un tiers en taillis et deux tiers en futaie

Dès 1823, une Ordonnance royale datée du 17 décembre prescrivit un nouveau Plan d’Aménagement Forestier en Grésigne. Cette Ordonnance précède donc la création de l’Ecole Nationale des Eaux-et-Forêts en 1824 qui va développer sur le terrain des forêts royales les premiers pas balbutiants d’une sylviculture rationnelle. Cette Ecole témoigne ainsi de la transition d’une forêt-cueillette naturelle à une forêt de plus en plus organisée afin de favoriser la croissance des bois correspondants aux besoins de l’époque. Ce fut le Secrétaire d’Etat aux Finances de Louis XVIII, le Toulousain Villèle, qui signa ce nouveau Plan d’Aménagement concernant les « 3 354 hectares 56 ares 59 centiares formant l’étendue totale de la forêt de la Grésigne qui sera réformée et réglée ainsi qu’il suit : 2 400 ha 36 a 05 ca seront aménagés en futaie, avec la révolution de 80 ans », étant stipulé que « la futaie serait répartie en 2 parties, divisée chacune en 80 coupes…954 ha 20 a 54 ca seront réservés aux taillis », étant précisé que « le taillis serait aménagé en 3 parties, comprenant chacune 16 coupes ».

Cette répartition était conçue « de manière qu’il y ait 5 coupes à exploiter annuellement dans cette forêt », dont le parcellement s’élevait à un total de 208 tènements (contre 166 actuellement). Ces nouvelles dispositions remplacèrent les « 4 coupes de 9 hectares l’une », égales à 36 hectares au total mises en vente annuellement jusque-là en Grésigne, superficie toujours conservée  mais répartie dorénavant « dans la futaie à 2 coupes de 15 hectares chacune environ, soit 30 hectares » et « dans le taillis à 3 coupes de 2 hectares chacune environ , soit 6 hectares ». Les coupes définitives pour le chêne exige un cycle de 150 ans et pour le taillis un cycle de 15 à 25 ans selon la qualité du sol.

Les cycles de croissance forestière déterminés par ces cinq coupes peuvent nous apparaître aujourd’hui excessivement  réduits mais ils correspondaient en 1823 à des besoins spécifiques de la consommation locale en bois dans cette première moitié du 19ème siècle ; besoins en bois orientés surtout vers la tonnellerie (merrain) et le tournage pour l’artisanat local (fuseaux pour le tissage), vers les hauts-fourneaux pour la production de fer dans les forges de Bruniquel et vers les fours utiles à la fabrication du verre à Hauteserre, enfin vers le bois de chauffage et la production de charbon de bois destinés aux utilisations domestiques des ménages (cuisine préparée dans l’âtre ou dans les fours-potagers, fabrication du pain au four banal, chauffage des habitations).

Les proportions de surfaces réservées à des parcelles distinctes affectées à la futaie ou au taillis, sont sensiblement les mêmes que celles qui existaient au temps de Froidour. Mais les taillis, fournissant surtout des bois de chauffe à partir des coupes d’éclaircie, iront en diminuant et leur surface ne représentera plus que le tiers de la forêt, car le charbon de terre extrait des mines de Carmaux par le Marquis de Solages commence à être distribué dans les principales villes de la région et concurrencera alors de plus en plus le charbon de bois obtenu en Grésigne.

D’autre part, il semble que les conseils, prescrits en 1818 par le Garde général pour développer le pacage des bovins en Grésigne dans son Procès-verbal de reconnaissance, n’aient pas été suivis par une administration forestière plutôt soucieuse de mettre un terme aux inconvénients et aux méfaits d’une forêt-pâturage qui, selon Rossignol, avait même été le lieu d’une transhumance d’animaux provenant du Bas-Quercy au cours des siècles précédents (11).

Nouvelles opérations de délimitation de la forêt de Grésigne en 1825

Edictées par les Instructions du 17 juillet 1824 qui devançaient les dispositions qui seront publiées dans le nouveau Code Forestier en 1827, les opérations de délimitation de la forêt de Grésigne vont confirmer les limites de la forêt avec celles des communes limitrophes, limites déjà dressées pour celles-ci à l’occasion de l’établissement des récents cadastres napoléoniens (12). lesquels demeurent toujours consultables dans nos secrétariats de mairie où ils sont pour la plupart conservés après avoir été restaurés.

Ce sera « Jean-Baptiste de Berbigié, arpenteur forestier à Bruniquel (Tarn-et-Garonne) » qui verra le 31 mars 1825 son offre de services de géomètre et celle de son personnel acceptée par l’administration forestière, pour effectuer les travaux suivants : « Confection du Plan de l’aménagement de la Grésigne (2 francs par hectare), mise en place des bornes du périmètre et de l’intérieur (1 franc par hectare), pour le tracé des fossés extérieurs par 100 mètres (1 franc), pour le tracé des routes et layons (50 francs par hectare) ».        

Les Archives départementales du Tarn ont conservé de ce travail d’arpentage réalisé en 1825 les renseignements suivants (13) concernant les caractéristiques du périmètre de la forêt :

CommuneLongueur en mètresMursFossés creusésFalaisesPassages (ou pas)Nombre de Pas
Penne5 489,005 141,00122,60 225,6015
Vaour1 460,40624,70790,00 35,505
Saint-Beauzile3 601,902 201,001 075,00279,5051,905
Sainte-Cécile3 659,30220,003 404,50 34,204
Montmiral2 672,400,002 652,50 20,903
Puicelcy4 991,6015,004 906,00 70,508
Larroque5 720,1054,005 553,00 42,505
       
Total27 594,708 255,7018 503,60279,50481,1045

Remarquons que le nombre total de passages d’entrées en Grésigne s’élevait  à 45 « Pas » que nous avons retrouvés, pour la plupart, sur une carte ancienne de la forêt. En tournant autour de la Grésigne dans le sens des aiguilles d’une montre, on trouve les principaux Pas suivants :

  • commune de Larroque : Pas del Riou, Pas de Mespel, Pas de Layrolles
  • commune de Puycelsi : Pas de las Fargues, Pas de la Favette, Pas de la Maison Forestière du Sauze, Pas de Cordes Haut, Pas de Cordes Bas, Pas del Loup, Pas du Roc du Cerf, Pas de Littré
  • commune de Castelnau de Montmiral : Pas de la Clède, Pas de la Maison Forestière de Castelnau, Pas de Bousquet
  • commune de Sainte-Cécile-du-Cayrou : Pas de Bondes Bas, Pas de Bondes Haut, Pas de Rieutord, Pas de Vigoural, Pas des Bautes
  • commune de Saint-Beauzile : Pas del Grézou, Pas de Caillaret, Pas de la Maison Forestière de la Doucène, Pas de Pontraute Haut et Bas
  • commune de Vaour : Pas Aimès, Pas des Bavres, Pas de Haute Serre
  • commune de Penne : Pas de l’Esquié, Pas de Fount Blanque, Pas de Caylivié, Pas de Fontbonne, Pas de la Maison Forestière de la Lignée, Pas de la Pommarède, Pas de las Borios, Pas de la Fount des Azes, Pas de Barri, Pas de Bray, Pas de la Maison Forestière de Périlhac, Pas des Alluiets.

Ces nombreux « Pas » (contraction occitane de passage), jalonnant les 27,594 kilomètres de son périmètre, sont pour la plupart abandonnés aujourd’hui et cinq, parmi les plus usités, étaient marqués par l’implantation de maisons forestières en bordure de Grésigne servant de domicile aux gardes des Eaux-et-Forêts. Ils témoignent alors de l’intensité des échanges entre la forêt et les populations des communautés limitrophes.

Adjudications, surenchères à la chandelle et conflits entre acheteurs

Il est traditionnel de dire que les exploitants forestiers, pour la plupart, assuraient leur ascension sociale à partir du métier de charbonnier, métier associant la fabrication du charbon de bois à sa vente au porte-à-porte dans les villes voisines par des vendeurs aussi rusés et chicaniers en affaire que pouvaient l’être les maquignons, mais surtout renommés bons vivants. Les chevaux qu’ils utilisaient dans leurs tournées lointaines (jusqu’à Cahors, Agen, ou Toulouse) ne s’arrêtaient automatiquement que dans les meilleures auberges !

Depuis les instructions de Froidour, l’administration forestière a toujours apporté les plus grands soins à l’organisation de ses ventes de bois non plus sur pied mais par parcelles. Ces ventes étaient accompagnées d’un cahier de charges précis et pointilleux quant aux droits et obligations des adjudicataires pour effectuer et enlever les bois vendus aux enchères les plus disantes. Déjà, Louis de Froidour, dans son traité de 1658, avait défini les procédures les plus sévères et les plus exigeantes pour améliorer le rendement des adjudications et leur mise en œuvre. Mais il en résultait quelques fois des passe-droits et des procès. C’est ainsi que les acheteurs éliminés pour des offres non retenues, trouvaient le moyen de faire annuler les décisions prises en faveur de leur concurrent déclaré adjudicataire. A titre d’exemple, c’est ce qui se produisit en 1830,  entre trois concurrents de taille.

Sous-bois

Le 15 octobre, « le Sieur de Robert,  Verrier de son état à Hauteserre » se porte acquéreur de la coupe d’un taillis en Grésigne aux « enchères simples » pour la somme de 10 295 francs. Le lendemain, 16 octobre, « le Sieur Antoine Delaye, Directeur des Forges de Bruniquel » offrait pour cette même coupe un cinquième de plus, soit 2 059 francs, portant le prix d’achat de la coupe à 12 354 francs. Le surlendemain 19 octobre, le « Sieur Bousquet de Montmiral » surenchérissait à son tour en s’engageant à payer un cinquième de plus et ainsi de suite, jusqu’à ce que les offres concurrentes des Sieurs Delaye et Bousquet aboutissent à faire monter le prix de la coupe si convoitée à 17 295, 60 Francs, somme à laquelle elle fut adjugée en dernier lieu au Sieur Bousquet lequel ne respecta pas cependant, pour sa dernière offre d’achat, la clause d’une augmentation du prix des 20% requis…

Mal en prit à l’administration pour sa décision illégale d’attribution de la coupe si disputée, car le Sieur Delaye porta plainte auprès du Conseil de la Préfecture du Tarn, faisant valoir que le Sieur Bousquet n’avait pas respecté les règles et contraintes de la procédure d’adjudication.

L’affaire s’envenima et fut portée ensuite en haut lieu. En effet, par lettre en date du 15 juin 1832, le Ministre des Finances approuvait la position également adoptée le 28 mai 1831 par la Direction des régies et la Direction des forêts auquel le Préfet du Tarn avait renvoyé l’affaire. Le plaignant Delaye obtint satisfaction en vertu des dispositions « précisant que les simples enchères ne peuvent être faites que par les personnes qui auront offert avant l’heure de midi du surlendemain de l’adjudication une surenchère qui ne pourra être moindre au cinquième de cette adjudication », et le Sieur Bousquet de Montmiral dut donc céder la coupe du taillis à son concurrent des forges de Bruniquel.

Ainsi que nous en rendent compte les procès-verbaux ratifiant les adjudications de cette époque (14), l’administration forestière savait aussi parfaitement tirer parti de la concurrence des acheteurs de bois en organisant les ventes des coupes de la forêt de Grésigne « à la bougie », après une large publicité faite par voie d’affiches. Ainsi l’exemple de l’une de ces ventes, haute en couleurs, où le Sieur Bousquet prit sa revanche à Gaillac le 23 mai 1834. Il y avait cette année-là, offert au plus-disant,  « une bande de taillis de 8 574 mètres de long sur 6 mètres de large, en 2 lots », adjudication organisée en lots permettant la construction d’un chemin forestier.

Pour le premier lot d’une longueur de 2 798 mètres, le Sieur Joseph Calvet du Cayrou avait présenté une offre dûment signée de 870 francs, à partir de laquelle la première  chandelle brûla et s’éteignit sans aucune offre nouvelle. Il en fut de même pour la seconde bougie. Ce ne fut qu’au troisième feu que se manifestèrent les offres successives de deux nouveaux acheteurs, celle du Sieur Jacques Canitrot pour 910 francs puis celle de Charles Moreau, directeur des forges de Bruniquel, pour 930 francs, enchère la plus élevée qui rendit ce dernier adjudicataire après que, de nouveau, trois nouvelles chandelles ne fussent consumées sans autre surenchérisseur.

Quant au second lot d’une longueur de 5 776 mètres, les premier et second feux ne firent pas l’objet d’une offre meilleure que celle exprimée au préalable par écrit s’élevant à 1 600 francs sur laquelle, au troisième feu, le Sieur Moreau  monta le prix à 1 620 francs. Ce fut au cours de la seconde série des trois bougies que les Sieurs Bousquet et Moreau se lancèrent dans un duel serré et réciproque où furent annoncées, coup sur coup, les enchères de 1 640, 1 660, 1 680, 1 720 francs, cette dernière permettant au Sieur Bousquet de prendre définitivement le dessus sur le représentant des forges de Bruniquel et de le conserver au cours des trois derniers feux de la troisième série de chandelles, après lesquels Bousquet fut cette fois déclaré adjudicataire sans aucun recours possible.

Ainsi se réglaient les comptes entre acheteurs concurrents des bois de Grésigne, sous la Restauration il y a quelque 170 ans. Cela continue de nos jours où certaines séances d’adjudication peuvent donner lieu à de cordiales mais secrètes ententes fomentées au cours de repas bien arrosés entre exploitants forestiers locaux. On peut assister au contraire à une concurrence sauvages lorsque les offres émises par les exploitants forestiers extérieurs, venant des Pyrénées ariégeoises ou du Cantal, viennent surenchérir les prix des entrepreneurs locaux depuis que les voies et moyens de transport se sont améliorés.

La savante et très touffue règlementation présidant aux marchés publics n’a jamais pu empêcher en effet, entre forestiers, des pratiques proches de celles des maquignons où intelligence et finesse président à des négociations serrées,  pouvant relever de la rouerie et d’ententes frauduleuses qui permettant de partager les coupes pour éviter de faire monter les prix. L’administration des Eaux-et-Forêts, remplacée par l’ONF (Office National des Forêts) depuis 1956, procède à l’attribution des coupes aux enchères descendantes sur la base d’un prix de départ dont le montant initial est établi à un niveau suffisamment élevé pour supporter des offres d’achat de plus en plus faibles, lesquelles peuvent provoquer le retrait de la vente de la  coupe mise aux enchères.

Une économie forestière liée aux activités d’une vie rurale autarcique

Pendant la Restauration où séviront les gouvernements de Louis XVIII et de Charles X, de 1815 à 1830, puis de Louis-Philippe pendant la Monarchie de Juillet, de 1830 à 1848, le mode de scrutin censitaire confiera aux notables ruraux des Communes situées autour de la Grésigne le soin d’exercer un pouvoir municipal oligarchique. Cependant, ce dernier redoutait les violences d’une population affamée par la disette, appréciant en contrepartie que la forêt royale reste fréquentée par une population locale nombreuse et très attachée à l’exercice de ses droits d’usage coutumiers.

Avec le maintien de la coutume consistant à bénéficier gratuitement des pacages dans les biens communaux (appelés « coudercs ») et les chaumes soumis traditionnellement à la vaine pâture, l’usage de la glandée et du pacage estival des animaux en Grésigne, autant que de prendre en forêt du « bois-mort gisant à terre et du mort-bois pendant », persistèrent pendant cette première moitié du 19ème siècle. De nombreux Grésignols se rendaient donc régulièrement en forêt, et ce qu’ils pouvaient en retirer n’était pas négligeable pour les familles pauvres constituant la majorité des habitants, tant pour l’approvisionnement en bois de chauffage de la maisonnée que pour l’entretien de la chèvre et du mulet ou encore pour l’engraissement du cochon traditionnellement tué en décembre ou janvier.

Le retour de la « Forêt Nationale » sous la Révolution à la « Forêt Royale de Grésigne » au cours de la Restauration prolongera,  pour les habitants des communes riveraines, le genre de vie d’un Ancien Régime qui n’en finit pas de mourir. Dans la société rurale des communes grésignoles, les bourgeois locaux et les nouveaux notables, sont tous prompts à s’adapter aux caprices de l’Histoire, en remplaçant les nobles et en s’alliant avec l’Eglise pour exploiter à bon marché une main-d’œuvre de brassiers besogneux, régentés dans nos campagnes par un ordre moral des plus réactionnaires que font régner ensemble « l’alliance du trône et de l’autel ».

Les Maires et leurs conseils municipaux avaient intérêt à ce que soient maintenus les droits d’usage en Grésigne au bénéfice de la population de leur commune, population en majorité pauvre, souffrant de faim à la suite de phénomènes atmosphériques détruisant les récoltes, levant facilement l’étendard de la révolte lors de soudures difficiles. En ces temps de famines, les Municipalités locales organisaient des ateliers de charité aussi bien que des distributions gratuites de pain à l’occasion des fêtes religieuses ou des grands évènements, sans se défaire d’une attitude de menace et de répression pour se faire craindre.  C’est dans ce contexte social difficile que va se renouveler une vague de procès entre les Communes riveraines de la forêt et l’État après la publication en 1827 du Code Forestier qui faisait suite au nouveau Plan d’Aménagement de la Grésigne arrêté par l’Ordonnance royale du 17 décembre 1823.

Jusqu’en 1840-1850, décennie où se développe la révolution industrielle avec les premières machines à vapeur, et où commence l’exode irréversible vers les villes d’une surpopulation rurale en forte croissance depuis plus d’un siècle, la population se trouve sous-alimentée par des ressources locales insuffisantes, parmi lesquelles la culture essentielle du blé n’obtient que de faibles rendements dans des terres peu fertiles.  La forêt de Grésigne va rester encore un espace juridique protégé en même temps qu’un territoire vital pour les gens du bois. 

Un petit peuple d’artisans ruraux tels que charpentiers (« fustiés »), menuisiers, charrons, « merrandiés » et tonneliers, sabotiers, tourneurs (« roubinetayres et fusayres »), « jouatiés » fabriquant des jougs, « arçonniés » fabriquant des arçons constituant la structure en bois des selles) continuent à utiliser  diverses essences de bois de Grésigne adaptées à leur fabrication (chêne, charme, châtaignier, hêtre, alisier merisier, cormier, buis …) dans les modestes ateliers donnant sur les cours et les ruelles alors bruyantes de nos villages. Ils façonnent de multiples objets tels que fuseaux pour le tissage de la laine, manches d’outils, fouets, piquets et clôtures… Avec la pierre que l’on extrait des nombreuses carrières sur les causses voisins pour construire les murs des divers bâtiments, on fabrique des éviers et autres bassins, des meules et des rouleaux, on aménage des routes et chemins. Ainsi la Grésigne participe à développer les multiples usages des matériaux d’une civilisation rurale où polyculture et autosubsistance sont de règle pour survivre.

Habiles manufacturiers utilisant la pierre et le bois, ces brassiers ou journaliers sont des petits propriétaires fonciers qui peuplent nos petits pays grésignols, cultivant  leurs lopins de vignes et leurs jardins dans les terrasses aménagées par des murets en pierre sèche sur les pentes entourant les vieux villages perchés et les hameaux. Ils  se louent lors des grands travaux agricoles saisonniers pour les semis, la fenaison et la moisson. Ce sont aussi, à l’occasion, des bûcherons, charbonniers, scieurs de long, casseurs de cailloux ou ouvriers-maçons, et  certains exercent le reste de l’année un artisanat pour mettre en œuvre les matières premières que sont le bois, la pierre, la laine ou le chanvre. Cette polyactivité assure leur vie quotidienne. Il faut y ajouter une aristocratie de l’artisanat rural, celle des maîtres-maçons et charpentiers, des tailleurs de pierre, des charrons, des menuisiers et des tonneliers traditionnels.

Quant aux gentilshommes verriers et leurs ouvriers, ils participent encore, sous la Restauration et jusqu’au début du Second Empire, à la vie forestière.  Si, à Puicelcy, les verreries du Sauze (dite aussi de Combalade) et de Littre, appartenant à la famille des de Suère, ont arrêté leurs fours en 1816, les verreries de la famille des de Robert à Haute-Serre, au nord de la forêt, fonctionneront jusqu’en 1852 avec un effectif pouvant atteindre une cinquantaine de salariés plus ou moins saisonniers (15). Sous la Restauration, la Grésigne continuera ainsi à fournir le bois aux fours de ces derniers gentilshommes verriers qui, n’ayant plus de privilèges depuis que Froidour les leur a supprimés, participent aux adjudications des coupes.

Les bois de la forêt de Grésigne face à la concurrence des houillères de Carmaux

L’extraction de la houille à Carmaux a commencé avec la création de la verrerie autorisée par Louis XV et se poursuit pendant la Révolution en 1791-1792 avec une centaine d’ouvriers pour une production annuelle de 4 000 tonnes. Elle atteindra 30 000 tonnes en 1839 avec 337 ouvriers. Jusque-là, les bois de Grésigne n’ont qu’une concurrence encore faible et très limitée du « charbon de terre ». Il  faudra attendre le dernier tiers du 19ème siècle pour voir se développer une exploitation du minerai  de charbon carmausin de façon plus active, qui s’élèvera autour de 500 000 tonnes avec un effectif  de 3 443 ouvriers en 1900 (16). Ces chiffres sont confirmés au niveau national où la production de houille passera de 1 490 000 tonnes en 1834 à 4 210 000 tonnes en 1845, tandis que les importations feront plus que tripler en atteignant 2 000 000 tonnes  pour faire face aux 7 000 000 tonnes consommées alors annuellement en France. Pour autant, le bois de Grésigne restera cependant l’unique combustible au plan local longtemps encore et son charbon de bois restera apprécié par les ménagères des villes voisines.

Ainsi, les huit coupes de bois mises en vente par adjudication faite à Gaillac le 17 octobre 1842, indiquent qu’il y a eu une augmentation sensible du volume annuel des bois exploités dans la forêt royale de la Grésigne. Le total des surfaces relevées cette année-là pour les coupes convenant à du bois de chauffe ou bien aptes à faire de la « charbonnette», sont composées de cinq lots tous acquis par un certain « Détape, Banquier à Paris » pour les besoins des forges de Bruniquel, et s’élèvent à bien plus que le double des 36 hectares coupées chaque année sous le Premier Empire et au-delà, soit exactement à 89 hectares 77 ares correspondant à :

  • « 3 coupes de taillis (23 ha 85 a, 12 ha 04 a, 13 ha 44a), pour les prix respectifs de 9 063 francs, 17 819 francs et 20 294 francs »,
  • « 2 coupes d’éclaircie (20 ha 24 a et 20 ha 20a) pour des prix respectifs de  4 655 francs et de 5 252 francs ».

Ont été vendus également, au cours de cette même adjudication du 17 octobre 1842,  5 415 arbres dénombrés en trois lots :

  • « 2 coupes secondaires, l’une de 1 016 arbres, et l’autre de 3 712 arbres, pour des prix respectifs de 2 810 francs et de 6 600 francs » selon l’offre d’un certain « Calbet de la Commune du Cayrou », lequel d’ailleurs sera déchu deux mois plus tard de l’achat de l’une de ces deux coupes au profit de « Bouissou Jean, Avocat au Verdier avec la caution de Maynal Alexandre »,
  • « Une coupe définitive située à Montoulieu de 687 arbres, pour un prix de 9 700 francs», coupe attribuée à « Bousquet Jean à Montmiral avec les cautions de Féral et Arvengas ». 

Cette adjudication qui permit aux caisses de l’Etat d’engranger une somme totale de « 76 193 francs, plus 3% pour les travaux de remise en état des chemins (2 285 francs) et plus 1,5% pour les frais d’adjudication (1 142 francs) » fait apparaître, d’une part l’importance du bois et du charbon destiné à la chauffe pour les forges de Bruniquel représentant près de 75 % de la valeur totale des ventes (56 586 francs sur les 76 193 francs au total), d’autre part l’obtention des coupes de bois en Grésigne par d’autres  acquéreurs exclusivement locaux en 1842.  

Dans cette première moitié du 19ème siècle, « le charbon de terre » n’est donc pas concurrent du bois de chauffage que l’on utilise encore prioritairement dans nos régions grésignoles et dans les villes voisines, ni du charbon de bois qui alimente le haut-fourneau de Bruniquel où se transforme le minerai de fer provenant des causses de Puycelsi et de Penne (17), pas plus que du bois utile aux verreries de Haute-Serre qui resteront actives jusqu’en 1851. Le bois de la forêt de Grésigne conserve donc un marché lié prioritairement à la vie et à l’économie de ses zones périphériques proches.

Ainsi s’expliquent, dans un environnement rural peu favorisé où la forêt génère un emploi important de main d’œuvre et un appoint de ressources diverses pour une population locale croissante au cours de la première moitié du 19èmesiècle, les mesures de protection que va prendre l’administration forestière sous la Restauration afin d’améliorer la gestion technique et économique de la Grésigne en la débarrassant de tous les privilèges accordés aux manants.  Nous allons voir cependant que l’interdiction des usages coutumiers découlant du nouveau Code Forestier de 1827 n’iront pas sans provoquer de vives réactions et des conflits divers au cours de la première moitié du 19ème siècle.

Les grands procès relatifs aux privilèges en forêt de Grésigne  (1827-1852)

Nous avons déjà noté les différends opposant, dès 1804-1805, les Conseils municipaux de Penne, de Puicelcy, de Saint-Beauzile et du Verdier à l’administration des Eaux-et-Forêts. Différends qui firent l’objet de diverses délibérations municipales réclamant, ici « droits de pâturage pour chèvres et boucs » et là, « droits de  glandage », ailleurs « ramassage de bois-mort gisant ou pendant ». Les habitants des communes riveraines de Grésigne se sentirent alors spoliées de leurs antiques privilèges par une administration forestière impériale puis de nouveau royale qui voulait en terminer avec les désordres traditionnels subis par une forêt-cueillette et plus encore par une forêt-pâturage, dans un espace juridique ouvert à tous.

L’importance attachée aux produits fournis par la Grésigne, si profitables et utiles pour la survie des populations locales pour la plupart pauvres et dénuées de tout bien-être, ne peut se comprendre que dans le contexte de misère et de sous-nutrition engendré par les crises alimentaires fréquentes qui sévirent dans nos régions au cours de cette première moitié du 19ème siècle. Il ne doit pas nous échapper pour autant que les doléances exprimées par les pauvres gens cachaient aussi à cette époque des intérêts autrement prédominants, réservés à quelques familles parmi les plus riches, propriétaires d’espaces fonciers importants, jouissant de droits d’usage personnels en  Grésigne.

Les courriers municipaux adressés à l’administration préfectorale continuent à revendiquer, sous le Premier Empire, le rétablissement et le maintien des droits d’usage collectifs.  Nous avons vu que ces réclamations, exprimées par les Maires des Communes limitrophes à la forêt auprès du Baron Baude, Préfet du Tarn, prirent passagèrement fin en 1813 avec celui du récalcitrant Maire de Penne, au moins pour quelques années, lorsque les drapeaux blancs furent accrochés au sommet de nos clochers pour fêter le retour du Roi Louis XVIII. 

Cependant, la clémence royale ne dura pas vis-à-vis de l’exercice des droits d’usage accordés à la population en Grésigne, ou ce qu’il en restait. Suite aux disettes des années 1816 et 1817, le sentiment de spoliation collective pour les petites gens restait très fort.

Un sentiment d’injustice se développa enfin lorsque l’on apprit que la justice royale reconnaissait à certains particuliers des compensations financières non négligeables pour la suppression de leurs privilèges personnels ou familiaux, privilèges acquis et préservés par leurs communautés depuis l’époque féodale et transmis jusque-là à quelques familles nobles par héritage. C’est ainsi que, par jugement en appel du Conseil d’Etat en date du 24 juillet 1821, « le Comte d’Huteau de Castelnau-de-Montmiral » se vit attribuer « une indemnité de 28 922, 74 francs ». Ce jugement reconnaissait ainsi le bien-fondé des indemnités fixées par le Tribunal de Première Instance de Gaillac qui avait maintenu les droits de pacage et de glandage en Grésigne en faveur dudit Comte, le 1er février 1808 (18).

Pour les édiles municipaux des collectivités riveraines, la justice aurait voulu qu’ils obtiennent semblable indemnité pour arrondir leur budget communal. Leurs réclamations s’exprimèrent de nouveau avec force et vigueur, en vue d’obtenir des indemnités de l’Etat qui viendraient compenser la diminution de leurs impôts communaux soulageant ainsi la fiscalité des plus riches au détriment des plus pauvres.

Les revendications avortées des Communes du Cayrou, de Saint-Beauzile, du Verdier et de Penne

Les prescriptions du nouveau Code Forestier en 1827, hostiles à toutes formes de privilèges dans les forêts du royaume, contribuèrent à faire éclore une flambée de protestations municipales pour faire valoir les droits d’usage de leurs ressortissants en Grésigne.

Ce fut le cas de la requête de la Commune du Cayrou qui, à la suite de la  délibération prise par son Conseil municipal le 18 avril 1829, a présenté ses titres donnant droit à ses habitants d’exercer divers privilèges en Grésigne. Quelques jours après, les 15 et 27 mai 1829, les titres des Communes de Saint-Beauzile et du Verdier ayant été rejetés, les conduisirent  « à ester en justice devant les tribunaux compétents pour se faire reconnaître leurs droits d’usage ». Nous n’avons pas trouvé de suite à cette décision, vraisemblablement entérinée de façon définitive.

Quant à la Commune de Penne, dont le nombre d’habitants passa de 2 000 en 1800 à 2 373 en 1831 avec quelque 506 ménages dont 145 vivant d’artisanats divers (chiffres très voisins de ceux de la commune de Puycelsi où la population atteindra 2 206 habitants en 1846), elle se lança dans un procès contre les Eaux-et-Forêts pour tenter d’obtenir réparation de la suppression des droits d’usage que ses habitants détenaient en Grésigne. Mais l’affaire fut vite réglée pour les Pennols, car la Cour royale de Toulouse prononça le 21 novembre 1842 un arrêt qui confirma celui du jugement du Tribunal de Gaillac en date du 21 octobre 1841 en condamnant « la Commune de Penne à payer les frais de justice s’élevant à 207,50 francs avant le 20 mai suivant ».  Quelles que fussent les tentatives du  Conseil municipal de la Commune de Penne pour faire respecter les droits  de ses ressortissants en Grésigne, ses réclamations pourtant bien fondées restèrent lettre morte.

Les démêlés juridiques de la Commune de Castelnau-de-Montmiral auprès du Tribunal civil de Gaillac

Quant à la municipalité de Castelnau-de-Montmiral qui, sous le Consulat et le Premier Empire,  avait délaissé les intérêts de ses habitants au seul profit de l’un des plus riches d’entre eux, à savoir le Baron d’Huteau qui sut tirer avantage de la suppression de ses privilèges familiaux en obtenant de se faire indemniser, le Maire de cette Commune « assigna le Préfet du Tarn devant le Tribunal civil de Gaillac par exploit d’huissier du 18 juillet 1829  »(19)… « pour voir ordonner que la Commune de Castelnau-de- Montmiral soit maintenue dans tous ses droits qui consistent à prendre dans la Forêt le bois pour faire du merrain pour tonneaux, pipes et barriques, le bois mort sec y comprenant le bois de charme pour faire du charbon, tous les arbres abattus par vents et autres cas fortuits, le droit de pouvoir y faire paître le bétail , le droit de prendre du gland gisant et tombé à terre ».

Le Maire de Montmiral énumérait là tous les privilèges traditionnels dont prétendaient bénéficier les ressortissants de la communauté à la suite de l’annulation des jugements de Bardon lors de la réformation de 1542, et dont l’usage persistait encore vraisemblablement malgré leur interdiction après la venue de Froidour en 1666.    

A cette demande, le Préfet du Tarn signifia au Tribunal un « mémoire en défense » le 31 octobre 1831 et un « mémoire supplétif » le 30 octobre 1850, qui eurent pour résultat de voir la Commune de Montmiral déboutée de tous ses droits « définitivement éteints par prescription » selon l’administration forestière.

Notons que le Tribunal de Gaillac prit des précautions encore plus réductrices, en faisant aussi référence « à la sentence de la Table de Marbre du 30 septembre 1677 » (suite aux accusations de Froidour) et précisa que les droits de la Commune de Montmiral énumérés dans l’exploit d’huissier du 18 juillet 1831 ci-avant cité, « étaient restreints au seul droit que les Montmiralais avaient  de prendre du bois-mort gisant, tel que cela leur avait été spécifié par arrêté de l’ancien Conseil en 1675 ». 

Ne se tenant pas pour battue, la Commune de Montmiral produisit, après enquête, une « liste de 21 témoins » qui conduisit le Tribunal de Gaillac à reconnaître de nouveau aux Montmiralais, par jugement du 27 juin  1853, « le seul droit à prendre en Grésigne le bois-mort gisant à terre ».

Mais, à la demande tenace de l’administration des Eaux-et-Forêts, il y eut de nouveau une contre-enquête établie le 25 avril 1855 qui mit en cause, le 29 février 1856, la validité des témoignages produits car il était exclu, selon les enquêteurs, « que les témoins puissent prétendre user de leurs droits publiquement sans être verbalisés », étant donné que « les gardes Delmas et Bonnafous reconnaissent que l’Inspecteur des forêts en 1818 et en 1819 avait prescrit d’empêcher les habitants de Montmiral de prendre du bois en Grésigne, quand bien même ils ne les auraient jamais verbalisés…» ! 

Cet argument tiré par les cheveux fut  accompagné, d’autre part, par la vérification des personnes ayant témoigné en faveur de la Commune « dont 19 ne peuvent être admis et les 2 autres étant insuffisants ».

Trêve d’arguties juridiques ! Le Tribunal de Gaillac rejeta ces témoignages le II mars 1856, ce qui conduisit le Directeur des Domaines à adresser au Préfet du Tarn une lettre datée du 7 juin 1856 où il conseillait vivement au représentant de l’Etat « d’acquiescer aux conclusions du Tribunal de Gaillac ».

Ainsi, sans aller en appel, les habitants de Castelnau-de-Montmiral durent renoncer à tous leurs autres droits d’usage, sauf celui de conserver dorénavant « le droit de prendre en Grésigne le bois-mort gisant à terre ». 

Les étapes d’une longue et coûteuse procédure qui opposa Puicelcy aux administrations de l’Etat pendant 25 années

A en juger par la tournure de l’affaire, mais aussi par la durée du conflit et par la détermination des parties en présence, il en alla bien plus loin et bien plus durement encore pour la Commune de Puicelcy dont le Maire, Joseph Denis Juin, était le descendant de Louis Denis Juin,  celui-là même qui avait participé à l’organisation de l’entreprise du Comte de Maillebois en 1770 avec le titre d’ingénieur des travaux forestiers, puis qui fut Maire de Puicelcy sous la Terreur en 1794-1795.

De par ses origines familiales, versé depuis longtemps dans les affaires forestières pour soutenir une requête efficace et persévérante devant l’administration des Domaines, requête dont nous repèrerons les principales étapes au vu des comptes rendus des séances du Conseil municipal (20), Joseph Denis Juin lança la Commune de Puycelsi en 1827 dans un procès resté célèbre. Décédé en 1832, il laissa à ses successeurs, les Maires Azémar Melchior jusqu’en 1846, puis Jean Joseph Augustin Arvengas de 1846 à 1848, et Renaud de Combalade de 1848 à 1852,  le soin de continuer la défense des intérêts de la Commune devant les tribunaux compétents. Voici quelques dates-jalons de cette curieuse affaire :

  1. 14 mai 1827, le Maire Joseph Denis Juin expose au Conseil municipal l’historique « des actes fondant les privilèges des habitants de la Communauté de Puicelcy en Grésigne depuis Philippe IV-le- Bel en 1304 ». Il précisait que « ces privilèges puisent leur origine à une date bien plus reculée, lorsqu’une partie de la forêt de Grésigne appelée Terroir de Castelfiguier dépendait de la Communauté de Puicelcy, et que les Consuls d’alors aliénèrent cette même partie en faveur de l’Etat, en recevant en échange la concession des droits de propriété et d’usage ». Ainsi, fut alors sollicitée auprès du Préfet du Tarn « la réintégration de la Commune de Puicelcy dans ses droits et privilèges, ou bien de lui faire obtenir une indemnité proportionnelle aux précieux avantages qui en étaient le résultat »,
  2. 24 juin 1828, le conservateur des Eaux-et-Forêts de Toulouse ayant annoncé par lettre du 28  mai 1828 « la déchéance des droits de la Commune de Puicelcy en Grésigne par prescription », le Maire Juin est autorisé par délibération du Conseil municipal « à demander au Conseil de Préfecture l’autorisation pour la Commune de Puicelcy d’ester en justice contre le Domaine ». Notons au passage que le motif de la prescription, invoqué par l’administration forestière à l’égard des habitants de Puicelcy, était de mauvaise foi.  Ce motif donnera lieu en effet à une abondante correspondance des Maires de Puicelcy confirmant la permanence de la pratique des droits d’usage de la population de cette commune en Grésigne,
  3. A ce sujet, une lettre du Maire de Puicelcy datée du 7 juin 1842 signale que « les Bordiers de la Vène, ceux de Lascroux, ainsi que les propriétaires de Layrolles et ceux des Grèzes disent sans mentir avoir eux-mêmes user de ces droits, et ont vu 20 personnes tous les jours passer devant leur porte, avec ou sans bestiaux, porter du bois de Grésigne  ». C’est dire l’importance de cette pratique, encore ces années-là où « 80 puicelciens se rendent quotidiennement en Grésigne » en utilisant l’un ou l’autre des quatre passages déjà indiqués,
  4. 13 avril 1829, le Maire de Puicelcy Joseph Denis Juin informe par lettre le Sous-Préfet de Gaillac que « le Maire de Larroque refuse de s’associer à Puicelcy pour la réclamation de ses droits et privilèges en Grésigne »,
  5. 10 novembre 1831, « le Conseil municipal de Puicelcy maintient la poursuite de son action en justice » malgré le mémoire des Domaines concernant la défense de l’administration des Eaux-et Forêts, « mémoire présenté au Maire par le Préfet du Tarn ayant diligenté à cet effet l’huissier Fouquier de Gaillac le 18 mars 1831 »,
  6. 8 novembre 1836, « suite à l’autorisation d’accorder le droit de pacage à un certain d’Huteau sur une portion importante de Grésigne » (il s’agit du Comte d’Huteau de Castelnau-de-Montmiral), le Maire de Puycelci Melchior Azémar exige « de lever la défense d’introduction des bestiaux de la Commune de Puicelcy en forêt, afin que ceux-ci puissent s’y nourrir des herbes abondantes et nutritives, moyennant rétribution ». Le Maire de Puycelsi s’élève ainsi contre l’injustice de l’administration royale reconnaissant audit Comte d’Huteau des droits de pacage en Grésigne dont sont privés les habitants de sa commune,
  7. 25 mars 1843, « le Maire Melchior Azémar expose au Conseil Municipal que, par Jugement du 23 mai 1836, le Tribunal de Gaillac a reconnu les droits, mais attendu que l’administration forestière a prétendu que la Commune de Puicelcy en avait perdu l’usage par la non-jouissance pendant 30 ans avant l’introduction de l’instance, la Commune a été admise à en prouver le contraire par enquête ». Le Conseil municipal délibère en conséquence que « le crédit de la somme de 400 francs doit être ouvert à Monsieur le Maire sur les fonds en réserve de la Commune pour pourvoir aux frais d’enquête et subsidiairement à ceux qui seront par la suite engagés par l’instance de la Commune contre l’État »,
  8. 12 mai 1847, le Conseil Municipal de Puicelcy, informé par le Maire Jean Joseph Augustin Arvengas, « que l’administration forestière vient de se pourvoir en cassation contre l’arrêt de la Cour royale de Toulouse en date du 30 avril 1845 qui est favorable aux intérêts de la Commune », vote la somme de « 300 francs pour payer les frais correspondants à ce pourvoi »,
  9. 7 mai 1848, « le Citoyen-Président de la Commission Municipale de Puicelcy Féral Pierre Thomas, autorisé par le Citoyen-Commissaire du Gouvernement pour le Département du Tarn fait voter une somme supplémentaire de 200 francs pour payer les frais en cassation ». Nous sommes en pleine Révolution de 1848. Le Roi Louis-Philippe a abdiqué en février et la Seconde République a été proclamée d’où le nouveau vocabulaire alors en vigueur dans les Communes et le Département pour désigner le Maire et le Préfet,
  10. 2 décembre 1849, le Maire Renaud de Combalade expose au Conseil municipal de Puicelcy,  réuni en session extraordinaire, « que par arrêt du 13 juin 1849, la Chambre Civile de la Cour de cassation statuant sur le pourvoi introduit au nom de l’Etat contre les droits et privilèges en Grésigne, a annulé l’arrêt de la Cour d’appel de Toulouse du 30 avril 1845 favorable à la Commune de Puicelcy et de Larroque en matière d’usage forestier dans la forêt domaniale de Grésigne. Cet arrêt renvoie la cause et les parties devant la Cour d’Appel de Montpellier et condamne la Commune aux dépens de l’Instance en Cassation montant, y compris le droit d’enregistrement de l’arrêt à 261,50 francs  ». Effectivement, cette dernière somme sera payée pour deux tiers par Puicelcy (174,44 francs) et un tiers par Larroque (21),
  11. mais à la lettre du Préfet du Tarn du 9 novembre 1849 demandant « aux deux communes de délibérer sur la question de savoir si elles entendent adhérer à  l’arrêt du 13 juin 1849 ou bien si elles persistent dans leurs prétentions », le Conseil municipal de Puicelcy, indécis, prétexta qu’il    « ajournait sa délibération de poursuivre l’Etat jusqu’à ce que l’avocat de la Commune fournisse les renseignements nécessaires  ».

Nous sommes là au tournant de l’affaire…

Après les arrêts encourageants rendus par le Tribunal de Gaillac en 1831 puis par la Cour d’Appel à Toulouse en 1845,  voilà que ces jugements favorables aux Communes de Puicelcy et de Larroque étaient cassés pour vice de forme en 1849 et renvoyés devant la Cour d’Appel de Montpellier.

Ici, le motif invoqué du vice de forme et le ton de provocation adopté par le Préfet à l’égard du Conseil municipal de Puycelsi montrent que le but poursuivi est bien de « promener » les édiles de la petite cité, par trop récalcitrante aux yeux de la haute administration.  

A la recherche d’un compromis pour clore le procès de Puicelcy…en queue de poisson

Les responsables communaux de Puicelcy seront d’autant plus lassés de ce procès contre l’Etat qu’il est onéreux et qu’il se déroule sous la pression du Préfet. L’année 1850 est marquée en effet par d’autres soucis que le Conseil municipal de Puycelsi traduit par des vœux, sollicitant auprès du Préfet du Tarn qui en a annoncé les fermetures imminentes, le maintien de la gendarmerie et de la perception locales et encore, réclamant des subventions départementales pour la poursuite de la construction de chemins départementaux inachevés et utiles pour désenclaver Puicelcy vers Montauban, via Bruniquel ou Monclar.

Face à ce rapport de force inégal qui mettait la Commune à la merci d’une tutelle pointilleuse la réduisant à être quémandeuse et dépendante des décisions du Préfet représentant l’Etat, la lassitude se lit dans les propos tenus par le Maire Renaud devant son Conseil municipal le 2 février 1851 « ma pensée a toujours été celle de croire que les Communes de Puicelcy et de Larroque sortiraient victorieuses du débat qui s’est élevé entr’elles et l’Etat, relativement à leurs droits d’usage en Grésigne… Mais cette affaire traîne en longueur, et les frais dispendieux qu’elle nécessite ne sont pas en rapport avec les ressources de la Commune…».     

Dans ces conditions, le Maire Renaud de Combalade, rappelant les jugements successifs prononcés par les divers tribunaux, justifiait alors l’opportunité de la recherche d’un compromis pour terminer cette affaire, en déclarant au Conseil municipal de Puicelcy « le jugement du Tribunal de Gaillac du 3 mai 1836 fut favorable, l’arrêt de la Cour d’Appel de Toulouse du 3 avril 1845 le fut aussi, mais un arrêt de la Cour de Cassation du 13 juin 1849 cassa et annula ce dernier arrêt et renvoya les parties où elles étaient avant ledit arrêt en les renvoyant devant la Cour d’Appel de Montpellier. Dans cet état de choses, et prévoyant que l’administration forestière nous traînera de juridiction en juridiction, j’eus l’honneur d’écrire au Préfet le 10 novembre dernier pour le prier de vouloir bien interposer son influence auprès de l’administration forestière dans le but d’un projet de transaction ».

Mais, au vu de l’attitude hostile du Préfet, l’Assemblée communale mandata son Maire sur le champ « pour transiger avec l’administration aux conditions et au chiffre qu’il avisera ».

Dès lors, l’administration des Eaux-et-Forêts allait imposer ses vues à la Commune de Puicelcy qui, imbue de son autorité passée sur la Grésigne et jalouse du bénéfice des droits qu’y exerçait sa population « depuis un temps immémorial », fut la seule Commune grésignole à résister au pouvoir en place pour maintenir ses privilèges ancestraux en allant jusqu’en Cassation.

Cependant, lorsque le vin est tiré, dit le proverbe, il faut le boire …jusqu’à la lie ! Et c’est ainsi que le 20 février 1852, le Conseil municipal de cette Commune, dont le territoire avait été déjà injustement spolié de la forêt de Grésigne en 1814, accepta sur proposition de l’administration des Domaines transmise par le Préfet « de se désister simplement et purement de ses droits dans la forêt domaniale de Grésigne…autre que celui de prendre le bois-mort…», disposition de réserve que la délibération municipale accompagna, dans un ultime sursaut de fierté, par celle du «…droit inhérent à cet usage ». 

En effet,  cette dernière précision fut encore jugée par trop excessive et inadmissible par les Eaux-et-Forêts, ce que le Préfet du Tarn fit savoir au Maire de Puicelcy par lettre du 12 mai 1852, faisant remarquer que « le Conservateur des Eaux-et-Forêts ne pouvait accepter la formulation de ce désistement, car il pense que le droit inhérent a l’usage du bois-mort implique dans l’esprit de la Commune de Puicelcy la faculté de ses habitants de pénétrer dans la forêt avec des voitures ou des bêtes de somme pour pratiquer son enlèvement  ».

Le Conseil municipal de Puicelcy, convenant de cette interprétation conforme à la réalité d’utiliser les animaux de trait ou de bât pour aller chercher du bois-mort en Grésigne, dut s’incliner définitivement sur ce point particulier, « reconnaissant que par le droit inhérent à cet usage, il avait été entendu que les bêtes de somme employées spécialement au transport du bois-mort pouvaient pacager dans la forêt pendant le temps nécessaire pour préparer la charge; et puisque cette réserve était un obstacle, il modifiait en conséquence sa délibération précédente ».

Ainsi s’achevait un très long procès qui dura 25 années, procès après lequel « la Commune de Puicelcy conservera pour ses habitants la prérogative de prendre en forêt de Grésigne le bois-mort, moyennant de se mettre en rapport avec l’Etat pour fixer l’indemnité qui pourrait lui être due  pour la concession de ce droit ».

A notre connaissance, sous cette dernière condition de paiement d’indemnité à l’Office National des Forêts, ce droit de « ramassage du bois-mort gisant » en Grésigne reste toujours en application de nos jours, moyennant une demande préalable à l’administration des Eaux-et-Forêts, accompagnée d’une indemnité annuelle ; et ce en utilisant même les transports motorisés modernes lesquels, à la différence de la denture des bêtes de somme du temps jadis, ne portent plus atteinte à la végétation forestière, à condition de rester sur les voies prévues à cet effet !

C’est ainsi que la prescription obligatoire d’exiger, à compter de 1852, une demande préalable auprès de l’administration avec paiement d’une indemnité, mettait fin à la pratique gratuite de l’un des derniers droits d’usage reconnus jusque-là et depuis toujours parmi les privilèges accordés en Grésigne aux habitants de la commune de Puicelcy.

Indemnités pour reconnaissance de droits aux familles héritières des seigneurs de Lamotte et de Bayne du Rouyre

Il faut rappeler que la justice de la Restauration et du Second Empire a consenti certaines faveurs, contrairement aux conclusions du procès rendu pour la Commune de Puicelcy, à quelques familles nobles, héritières des anciens « Seigneurs féodaux de Lamotte et de Bayne du Rouyre » (anciens seigneurs féodaux de Penne) qui, à la fin du 13èmesiècle, avaient vendu au Roi de France quelques tènements de la forêt de Grésigne situés en bordure de la commune actuelle de Sainte-Cécile du Cayrou. Après celles obtenues par le Comte d’Huteau, ces sentences discriminatoires ne font que confirmer la morale célèbre de la fable de La Fontaine   « Les animaux malades de la peste » :

                               « Selon que vous serez puissant ou misérable,

                               Les jugements de Cour vous rendront blanc ou noir. »

Ces avantageuses décisions  furent transmis, notamment  à titre d’héritier de l’ancienne famille de Lamotte (22) à « Monsieur Marie-Raymond des Vignes de Puilarroque, successeur aux droits par hérédité de Marie-Blanche Adélaîde de Bonfontan, marquise de Puilarroque, droits qu’elle tenait de l’achat d’un bois de Grésigne en 1282 par le Roi de France au seigneur Bernard de Lamotte. Ces droits furent pleinement reconnus de 1282 jusqu’au 24 mars 1667 où un jugement de la Réformation les restreignit à une délivrance annuelle de 30 cordes (soit 115 stères 17 centistères),  furent aussi reconnus  par décision du Ministre des Finances en date du 21 mai 1817 jusqu’au 11 avril 1853  où ils furent suspendus ». Cependant, ledit héritier obtint le rétablissement de cette délivrance par arrêt du Jugement de la Cour de Cassation en date du 20 février 1856, ce qui lui valut « le remboursement par l’administration des Eaux-et-Forêts d’une somme de 1 744,33 francs à titre d’arrérages pour les trois années dues 1833, 1854, et 1855 », somme correspondant au prix de « 345, 51 stères de bois de chauffage » représentant trois fois les « 115, 17 stères qui devaient lui être délivrées annuellement ».

Avantages également accordés à titre d’héritiers ou ayant-droit des biens de la famille de Bayne du Rouyre (23) par la direction générale de l’enregistrement des Domaines du Département du Tarn, par le même Arrêt de la Cour de Cassation cité ci-avant qui s’obligea à liquider, « pour privation des délivrances usagères en Grésigne pendant 9 ans », une indemnité annuelle de « 4 975,38 Francs » représentant la valeur de « 30 cordes de bois usagères de 3,839 stères chacune à 4,80 francs l’une », indemnité répartie comme suit, « en vertu des cessions à eux faites par le Baron de Rouyre » : « 79 stères à  Madame de la Broquère » et « 52 stères aux héritiers du Sieur Montet ». En effet, à la demande de ces derniers, le jugement  du Tribunal de Gaillac en date du 16 juin 1851 avait condamné l’Etat à leur reconnaitre « le droit primitif de la famille de Bayne du Rouyre ». Mais l’affaire étant portée ensuite devant les Cours de Justice en appel et en cassation, les Eaux-et Forêts n’avaient plus attribué en Grésigne, depuis 1847 jusqu’en 1856, les « 30 cordes usagères » aux derniers ayant-droit susnommés qui se virent ainsi dédommagés, le 27 juin 1859, par de très coquettes sommes d’argent correspondant aux arrérages de ces 9 années d’oubli.

A notre connaissance, ces gracieusetés de l’administration des Eaux-et-Forêts se poursuivent encore de nos jours en Grésigne aux frais de la République, sous forme de redevances de bois de chauffage en nature à des familles qui vont le faire quérir sur place en forêt, chaque année. Comme on le voit, les privilèges n’ont donc pas encore totalement disparu en forêt de Grésigne depuis la nuit du 4 août 1789 !


  1. Cf l’installation de l’adjoint au  Maire Jean Joseph Arvengas le 19 septembre 1814 et du Maire Joseph Denis Juin le 24 décembre 1815 (registre des délibérations municipales de Puicelcy de 1814 à 1837, Archives communales)
  2. Délibérations du Conseil municipal de Puicelcy  du 20 février et du 6 novembre 1853
  3. Délibération municipale du 2 février 1851 (Registre municipal de 1838 à 1856, Archives communales)
  4. Pierre Malrieu, « Deux villes d’Occitanie à travers l’histoire : Penne en Albigeois, Bruniquel enQuercy», Editions la Duraulié, 1986, page 196
  5. Délibérations du 12 mai 1854, du 6 août 1854 et du 11 novembre 1855 (Registre Municipal de 1838 à 1856, Archives communales)
  6. Article de Portal, ancien Directeur des Archives départementales du Tarn (dont l’un des ancêtres fut le Maire de Castelnau-de-Montmiral sous l’Empire), article portant sur les mesures locales anciennes et leur conversion, selon l’étude faite par Isidore Bouquet  en 1840 (Annuaire du Tarn, année 1913, page 437 et suivantes
  7. Gérard Soutadé, « La Grésigne et ses abords » in Revue Géographique des Pyrénées, 1957, pp 237 à 271
  8. Charles Portal « Le Tarn au Dix-Neuvième Siècle», 1912, page 363
  9. Se rapporter aux recherches effectuées de 1964 à 1966 par F. et R. Cubaynes , Jean-Pierre Petit et F. Lasserre sur la faune et la flore des premier et second siècles de notre ère, à l’occasion des fouilles menées sur « le site de la Villa Gallo-Romaine de Larroque » dans la commune de Cestayrols
  10. Ceux qui fabriquent les merrains servant aux douves des tonneaux
  11. E. Rossignol « Etude sur l’Histoire des Institutions Seigneuriales et Communales de l’Arrondissement de Gaillac », Toulouse, 1866, page 63, indique qu’au Moyen Age, « les hauteurs boisées de la Grésigne attiraient même les troupeaux du Bas-Quercy depuis Montricoux,  Septfonds et Caylus »
  12. Ces cadastres demeurent consultables dans nos secrétariats de mairie où ils sont pour la plupart restaurés et conservés
  13. Dossier 5 P 18, A D T à Albi.
  14. Dossier  5 P 17 aux Archives départementales du Tarn
  15. Pour la cessation d’activité de la verrerie du Sauze et celle de Littre à Puicelcy en 1816, voir l’indication de cette cessation dans le procès-verbal de reconnaissance de la Grésigne de 1818. Pour les verreries de Haute-Serre, voir l’article de M. Delpech et G. Farenc dans la Revue du Tarn n° 57 où les auteurs signalent qu’en 1848 Paul de Robert,  célibataire, légua sa verrerie où travaillaient 25 ouvriers à son ami Paul Raynaud et à son frère Auguste, dont une lettre  de 1852 demande à ce qu’il ne soit plus soumis à la patente de 98,61 francs,  en décidant alors d’arrêter définitivement la verrerie qui ne fonctionnait plus que trois mois par an depuis 1850, faute d’un rapport suffisant
  16. Cf page 399, les statistiques citées par Charles Portal dans son livre « Le Département du Tarn au Dix-Neuvième Siècle » édité en 1912. Voir également page173 du livre de Jean Vareilles « Carmaux au 20ème Siècle », Editions Vent Terral, avril 1992
  17. Dans sa communication intitulée « les Minières de Penne-Puycelsi et les Forges de Bruniquel » parue dans la Revue du Tarn n° 91 (automne 1978), Raymond Granier donne la liste des Maîtres de Forges successifs qui dirigèrent les hauts fourneaux et les forges de la première usine de Courbeval sur la Vère (1796 à 1826), puis de la seconde usine de Caussanus sur l’Aveyron (1821 à 1880) dans la commune de Bruniquel
  18. Dossier 5 P 17 aux Archives départementales du Tarn
  19. Dossier 5 P 17, Archives départementales du Tarn
  20. Cf les deux registres des délibérations municipales de Puycelsi du 25 mai 1814 au 10 novembre 1837 et celui du 12 mai 1838 au 12 mai 1856
  21. Délibération du Conseil municipal de Puicelcy en date du 10 mai 1850 votant le budget communal
  22. Le dossier de ce jugement se trouve aux Archives départementales du Tarn (5 P 20)
  23. Jugement dans le dossier 5 P 19 aux Archives départementales du Tarn
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